Au Nanbudo, nous avons les trois principes, les sept forces, les dix éléments de la nature et des animaux réels ou symboliques du Ki Nanbu Taiso. Nous avons également les cinq points cardinaux que nous retrouvons particulièrement dans les Shiho Tai no Kata, Ki Nanbu Taiso Sho, Shizen no Ki Undo…Nous avons les cinq saisons que nous retrouvons par exemple dans les Cinq Nanbu Kata. Nous avons les sept éléments qui figurent sur notre emblème en écusson porté avec notre Nanbudo Gi côté coeur, dans les Shizen no Ki, les Nanbu Tenchi Undo.
Sans le développer ici, les philosophies asiatiques possèdent des points communs et des points singuliers selon les pays : le Japon n'est pas la Chine ! Exactement comme en Europe avec tout ce qui nous est commun et toutes les différences entre les diverses nations.
Par rapport à la Chine, le Japon va s'en nourrir, adapter, épurer, structurer ses apports dans le cadre de sa propre histoire, de sa propre culture, et ce avec de très longues périodes de fermeture, que ce soit au niveau philosophique avec la pensée Shinto, médicinal avec le Kampo et le Shiatsu, artistique culturel, au Combat avec le Bushido etc…
Si les influences sont réelles, nous sommes loin de l'histoire mécanique où tout ce qui est Japonais vient de la Chine via la Corée. Si l'influence de la philosophie grecque est réelle en Europe, la France, l'Angleterre, l'Allemagne ne sont ni la Grèce, ni identiques entre elles !
Pour revenir à un point de vue plus général, je pense que l'on peut dire que les philosophies asiatiques sont basées essentiellement sur l'observation de la nature.
C'est une construction qui comprend entre autres une conception de la situation de l'homme entre la terre et le ciel, le yin et le yang (inn et yo en japonais), le Ki (ou peut-être les Ki), les 5 principes, etc….
C'est très complexe, plein de nuances, comme beaucoup de philosophies d'ailleurs, et il faut se garder des résumés simplistes voulant les faire rentrer de force dans des cases, à la recherche des vérités toutes faites ou des dogmes.
Je vais donc essayer de simplifier pour tout le monde, mais sans déformer, en fait introduire sans les longs développements possibles, pour notre pratique du Nanbudo et non pas pour être philosophe professionnel, médecin etc…
A partir de premières recherches, les anciens (probablement chinois pour ceux qui ont conceptualisé cela de manière très approfondie) ont pensé que l'univers, la vie, devait être organisés de manière cohérente, de l'infiniment petit à l'infiniment grand. Ils vont alors intensifier l'observation de la nature pour y trouver ces lois, ces règles, valables pour comprendre l'homme, l'animal, le végétal, le cosmos etc…
A partir d'une conception de l'homme entre le ciel et la terre, du Yin (la terre, dense, que l'on peut toucher, palpable, visible) et du Yang (le ciel, éthéré, que l'on ne peut pas toucher, impalpable, invisible), les anciens (probablement chinois) se sont dit que la terre avait quelque chose à voir avec l'espace territorial (en logique visible, palpable) et que le ciel avait quelque chose à voir avec le temps (en logique impalpable, invisible).
Les cinq points cardinaux :
Pour faire simple, nous avons les quatre points cardinaux. Mais la notion de relativité oblige à se poser la question : qu'est ce que le nord, par exemple. Si l'on pose la question à un Ariègeois, Paris est au nord, mais si on pose la question à un Lillois, Paris est au sud ! Un point cardinal, seul, n'a donc aucun sens. Il ne se définit que par rapport au point d'observation. Les anciens ont donc ajouté un cinquième point cardinal : au centre. C'est à partir de ce dernier que tous prennent un sens.
Lorsque l'on réalise un Shiho Tai no Kata, nous démarrons au centre, et allons vers les quatre directions en commençant par l'est puis ouest, nord pour terminer vers le sud avant de revenir en position de salut final. Nous nous mettons ainsi à l'unisson du mouvement circulaire de la terre.
Les cinq saisons :
Par cohérence, il fallait donc qu'il y ait 5 saisons ! Les anciens ont observé que dans la journée il y a bien sûr le jour et la nuit. Mais le matin, alors qu'il ne fait plus tout à fait nuit mais pas encore jour, il y a l'aube. Le soir, lorsqu'il ne fait pas tout à fait jour mais pas encore nuit il y a le crépuscule. Ca ne passe donc pas directement du jour à la nuit et de la nuit au jour, il y a des phases intermédiaires. Il en est de même pour les saisons, qu'ils ont appelé intersaison pour conceptualiser la 5e saison. Elle est située à peut près au troisième quart de la saison soient le 18e jour avant la fin de la saison.
Nanbu Shodan c'est le kata du printemps, Nanbu Nidan celui de l'été, Nanbu Sandan celui de l'automne, Nanbu Yodan celui de l'hiver et Nanbu Godan celui de la 5e saison, c'est-à-dire des quatre intersaisons, des quatre transitions d'une saison à une autre.
Doshu insistait beaucoup sur Nanbu Shodan, le début, des mouvements amples, souvent lents, d'éveil de la nature, avec la symbolisation dans le troisième mouvement de Sakura, le cerisier mythique du japon, en fleur à cette période.
Il disait également du Nanbu Nidan qu'il avait des mouvements brefs, cassants, telles les brindilles séchées au soleil, craquantes sous les pieds lorsque l'on marche dessus.
Nous retrouvons les liens dans ce cinquième principe où, par exemple, le Yang à son apogée est au ciel, en haut. Le chaud monte plutôt au ciel, l'été est le mois le plus chaud, il fait plus chaud au sud, le feu est chaud, donc on retrouve tout cela en haut du schéma.
Nous retrouvons ici, également, les cinq éléments : terre, bois, feu, métal et eau qui vont servir énormément en médecine.
Nous avons l'habitude de figurer le nord en haut sur nos cartes géographiques alors qu'en Chine c'était le Sud qui figurait en haut.
Je vous donne un autre élément d'explication : au printemps, la végétation redémarre, la température se réchauffe, on quitte l'hiver qui était au maximum du yin pour aller vers l'été qui est au maximum du yang, le yin et le yang s'équilibrent. En toute logique le soleil se lève à l'est renouveau du jour comme le printemps est le renouveau de la végétation et de la vie. Le bois est l'élément qui symbolise cette croissance de la végétation.
Je vous laisse deviner le reste !
Bien sûr plus nous avançons, plus l'idée de cycle, de cycle naturel, de flux et de reflux, s'impose à notre esprit, mais limitant volontairement mon propos, je ne vais pas l'exposer ici.
Les Sept éléments
La lune (Tsuki), le ciel (Ten), la terre (Chi), le Lotus (Hasu), le bois (Ki), l'eau (Mizu), l'air (Ku) sont les sept éléments que nous retrouvons souvent au Nanbudo.
Tsuki, c'est l'influence de la lune sur l'univers, sur les marées de l'océan avec son flux et son reflux
Ten, nous permet de respirer, qui nous donne le Ki du ciel, mais recèle également tant de mystères à découvrir.
Chi sur laquelle nous vivons, la terre mère, la Pachamama en Amérique latine, que nous devrions mieux écouter, que nous devrions mieux respecter, qui nous nourrit, qui nous donne le Ki de la terre.
Hasu qui a ses racines en terre, vit dans l'eau et fleurit dans l'air : le cycle de la vie.
Ki contribue à purifier la nature et nous abrite.
Mizu, source vitale, douceur et violence
Ku élément vital qui englobe notre vie, évoque l'univers
Nous allons les découvrir différemment selon nos exercices mais chacune et chacun peuvent y ajouter des significations.
Au Nanbudo la nature est toujours présente ?
Doshu, pour créer le nanbudo, tels les anciens, cités plus hauts, a écrit : « la nature est une source inépuisable d'enseignements » et « la nature a été mon professeur »
Je ne saurais que vous conseiller de lire et relire ses livres, tant ils sont riches d'enseignements que l'on ne perçoit pas forcément à la première lecture.
Portez vous bien, on ne lâche rien et à bientôt.
Je vous embrasse.
Stéphane Carel Dai Shihan