Les petites pierres de Daï Shihan XXXXV : Quelques mots de Yoshinao Nanbu Doshu Soke

Publié le 31/03/22
AFDP Nanbudo
Les petites pierres de Daï Shihan XXXXV : Quelques mots de Yoshinao Nanbu Doshu Soke

Fin du pass vaccinal, fin des masques, reprise des cours et des stages nationaux et internationaux, le plaisir de se retrouver, soyons heureux de ce que nous vivons maintenant.

Bien occupé en ce moment, je n'ai pas eu le temps d'aborder un sujet comme je faisais jusqu'à maintenant et je vous propose quelques propos divers de Yoshinao Nanbu Doshu Soke, qui nous manque tant, et dont la présence, la voix, le sourire nous environnent dans tous les lieux et les espaces où nous l'avons côtoyé.

Vous verrez notamment le Yin et le Yang : le Nanbudo c'est le Karaté au-delà du Karaté et le Nanbudo ce n'est pas du Karaté, dialectique du mouvement !

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Lors d'un débat en 1976 entre Nanbu Doshu, Jean Pierre Lavorato, Claude Boucabeille et Daniel Renesson pour la revue Karatekas :

« Il faut tout de même remarquer que dans la modernisation actuelle du Karaté, cette répétition des mouvements tellement contestée a été remplacée par ce que j'appellerai une certaine superficialité des exercices ayant pour but unique la compétition. Dans cette optique particulière, les coups doivent être très rapides puisqu'ils sont destinés uniquement à une touche qui marquera. Par conséquent, les faire une dizaine de fois à chaque entraînement est amplement suffisant. Cette conception est hélas incomplète car ce qui fait la force du Karaté, c'est l'efficacité et la puissance destructrice d'un mouvement. Un mouvement, un seul, doit pouvoir neutraliser complètement un adversaire. Définitivement ! Un Mae Geri, un Mawashi Geri et c'est fini ! Pour acquérir cela il faut alors faire des sacrifices et répéter, répéter inlassablement, souvent et longtemps. »

« On parle, à mon avis, trop de l'esprit sportif du karaté et pas assez de l'esprit art martial. Pour moi, le Karaté est avant tout un art martial, c'est-à-dire une certaine façon de vivre, une éducation intellectuelle et morale bien particulière. Le Karaté n'est pas simplement comme on a trop souvent l'habitude de le penser, une façon efficace de taper sur son voisin, même pour se défendre ! Pour pratiquer le Karaté (comme tout art martial d'ailleurs), il faut avant tout être intelligent et je dirais même plus évolué que le commun du mortel. »


Page de présentation du livre de Nanbu Doshu Nanbudo, Art martial de l'an 2000 :

« NANBUDO

Un Art de création d'énergie

UNE VOIE

UN SPORT

UN ART DE VIVRE

UNE METHODE D'AUTODEFENSE »

Interview 1978 dans la revue Karaté :

« Je pense que les arts martiaux nous servent d'abord à avoir une énergie. Parfois il faut connaître le danger et le moyen de sauver sa vie. Avec l'énergie que nous donne la pratique des arts martiaux cela devient possible, c'est le contrôle de l'énergie. »

« Sept années s'était écoulées depuis la fondation de mon école. J'avais organisé les premiers championnats du monde Sankukai. Tout était au point, mais il manquait encore une certaine liberté de corps de mouvement. Dans le Nanbudo, j'ai cherché à éviter l'emploi de la force et à accumuler l'énergie interne. »

« Ainsi, le Nanbudo, c'est le Karaté au-delà du Karaté. »

« Cela n'a rien à voir avec le Karaté, le Judo où l'Aïkido, c'est tout à fait nouveau »

Interview dans la revue Karaté

« Le Sankukai est une gymnastique respiratoire, psychique. Mais pour atteindre le sommet, j'ai créé le Nanbudo, ça n'a rien à voir avec le Karaté traditionnel. Il n'y a plus de Ikite, par exemple. Les mouvements syncopés et rigide du Karaté sont remplacés par des gestes naturels, souples, le rythme est beaucoup plus coulé que dans les autres styles. On recherche l'harmonie par des mouvements circulaires le cercle absorbe la force du partenaire et l'associe à la nôtre »

Intervention de Nanbu Doshu au Nanbudo Kaikan en 1993

« Joie de vivre :

1) Il ne faut plus dire « je ne suis pas content »
2) Remercier
3) 3 chemins de la négativité/3 aspects de la positivité

Toujours pas content/honnête
Toujours affolé/gentil
Toujours triste/gai

4)Rire »

Interview dans Budo International en 1995 :

« J'ai été et je suis un pratiquant de Karaté. Aussi ne puis-je nier qu'il ait changé. Le Karaté est pour moi un art martial idéal, non dans son état actuel, mais dans ce que j'en ai vu, dans ce que j'en ai expérimenté moi-même. Des motifs importants ont créé une notable différence dans ma façon actuelle de voir les arts martiaux en général et le Karaté. J'ai décelé un manque de créativité, d'énergie. La créativité est essentielle, c'est en quelque sorte la matière première qui nous permet de nous adapter à notre environnement physique, mental et spirituel. Et l'énergie est le moteur propulseur. Il faut donner de la force à l'intuition, à la sensibilité, à l'imagination, et, pour ce faire, il faut une grande énergie. C'est la raison principale pour laquelle, au départ, j'ai développé le Nanbudo. Le Nanbudo est très tourné vers la création de l'énergie. »

Le Conseil du Maitre dans la revue Karaté en 1997 :

« Pratiquez avec l'idée de développer toutes vos facultés créatrices et cela dans une optique à long terme plutôt qu'à court terme. Essayez d'avancer tout au long de votre existence. Développez un état d'esprit positif qui puisse renverser les situations les plus difficiles. Il faut forger en vous confiance et conviction »

Intervention du Nanbu Doshu l'ors de l'AG de la WNF en 2000 :

« Pas de rails mais un éventail. Si institutionnalisation, on perd »

Dans une interview de la FFKDA :

« Le Karaté, une carte de la vie
Ce que je propose aux gens, c'est surtout de la difficulté ! Mon école n'est pas facile d'accès, avec de nombreux aspects différents, beaucoup de techniques, et je crois que c'est une bonne chose. Quelqu'un m'a dit un jour que, pour la vie, il faudrait avoir une carte. Etre comme un voyageur, avoir un but précis, un itinéraire choisi. Le Karaté représente cela, il est la carte de la vie. Quand on pratique, on apprend quel est son objectif et les étapes intermédiaires à franchir. On développe les qualités d'un voyageur, on se connaît mieux. Comme avec une carte, on peut appliquer cette expérience des arts martiaux à l'existence toute entière. Se donner un but, choisir son chemin, les étapes à atteindre…

…Jusqu'au bout

En vieillissant, j'ai perdu les muscles de ma jeunesse, mais je suis plus fort qu'avant. A mon âge, le physique devient secondaire, le mental est prédominant. Je ne souhaite rien d'autre que de vivre ici en France où j'ai vécu la plus longue part de ma vie, avec ma femme et ma fille - en tâchant de faire pardonner mes absences fréquentes, à travailler avec mes élèves. Le jour où je n'enseigne plus, alors mon art devient faible, mon travail sans vitalité, creux. J'aime travailler avec mes élèves. Aussi longtemps qu'on travaille, on trouve des choses nouvelles, on réfléchit, on organise et on peut donner aux autres le résultat d'un travail bien fait. C'est ma mentalité et cela me paraît naturel. Enseigner, c'est apprendre soi-même et apprendre, c'est créer. Je ferai cela jusqu'au bout. »

A une question posée par un journaliste, Rolland Gaillac, de la revue Karaté en 1977 qui lui demande combien de temps il compte rester en France Nanbu Doshu répond : « Mais…toute une vie ! Je ne veux plus en repartir ! Bien sûr je voyage beaucoup. J'ai l'intention de créer un club mondial, le « Club karaté Nanbu » pour développer ma méthode, et cela me forcera à me déplacer. J'aurai d'ailleurs l'occasion d'en reparler d'ici un mois ou deux. Mais le quartier général en sera ici, au Cap d'Agde et à Paris, mes deux domiciles. Je ferai peut-être un petit voyage au Japon de temps en temps pour voir ma famille. Mais désormais, ma patrie… C'est ici. »

En 1992, lors d'une interview dans le Magazine Karaté Bushido il évoque la volonté d'un grand centre pour le Nanbudo, et à la question du lieu, Nanbu Doshu répond : « Entre Toulouse et Bordeaux. J'aime bien la France. »

Nanbu Doshu termine son livre Les techniques Yin du Nanbudo volume 1 paru en 2016 par :

« Je voudrais partager avec vous une dernière chose. Je pense qu'en toutes circonstances, il faut aussi penser profondément et de façon détaillée à ce qu'on doit faire.

Pour ma part je me dis : Cette idée est-elle acceptable pour ce sujet ? Est-elle assez large et universelle ? Vise-t-elle assez haut ? Vivra-t-elle assez longtemps ? Traversera-t-elle l'épreuve du temps ? Ces quatre points sont toujours présents à mon esprit. Ils me servent de cadre d'analyse, de jugement sur ce que je dois

Faire.

Il est aussi important d'avoir des principes de vie : Jinseikun en japonais (人生訓).

JIN(人) : l'homme, la femme, la personne marchant debout

SEI (生) : la vie de la plante qui naît, pousse, originel, pur, authentique

KUN(訓): précepte, enseignement, la rivière et son flot, avec en plus la parole cela devient un flot de paroles.

Il est décrit ici un maître avec ses principes et son enseignement.

Les principes de vie que je propose et que j'ai fait miens, sont les suivants :

Shogai Keiko (生涯稽古) Poursuivre sa pratique sa vie durant

Shogai Yuki(生涯勇気) Baser sa vie sur le courage et la persévérance

Shogai shinnen (生涯信念) Mener une vie guidée par ses convictions »

Nanbu Doshu termine son dernier livre les techniques Yin du Nanbudo volume 4 paru en 2019 par :

« Devenir fort est bien sûr une chose, mais l'essentiel, c'est de travailler sur l'harmonie pour améliorer l'homme. Lui donner des outils pour construire son chemin de vie, c'est très important, même pour les débutants. C'est important que tous les cadres du Nanbudo mettent l'accent sur cet aspect.

Les choses changent, évoluent, mais la base reste la même. »

De quoi partager, réfléchir, lire à nouveaux.
Quelle chance avons-nous eu, quelle chance avons-nous !

Je vous embrasse.

Carel Stéphane Daï Shihan

AFDP Nanbudo

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